Laurie Halse Anderson, Vous parler de ça, éds La belle Colère
Mon coup de coeur :Vous parler de ça est un roman qui m'a marquée. J'ai un gros coup de coeur pour ce livre. J'espère rendre la puissance, la richesse et surtout la gravité de cette histoire sans trop la dévoiler...
J'ai plongé sans réserve dans ce récit grâce à son personnage principal, Melinda Sordino, une jeune fille de 14 ans mutique mais au regard fort aiguisé et à la pensée bien vive. Nous faisons sa connaissance dès le tout début du roman. Nous assistons alors à son premier jour au lycée. D'emblée le lecteur tout autant que le personnage savons qu'au-delà de cette journée c'est l'année scolaire qui va être éprouvante, cruelle et capitale dans la vie de cette toute jeune fille. "C’est la rentrée ; mon premier jour au lycée. Je pars avec sept cahiers neufs, une jupe que je déteste et l'estomac noué. (...) Ça y est, les élèves envahissent le car par groupes de quatre ou cinq. En s’avançant dans l’allée, celles et ceux que j’avais connus au collège, en sport ou en travaux pratiques de physique-chimie, me jettent des regards noirs. Je ferme les yeux. C’est bien ce que je craignais. Lorsque le car a fini de recueillir ses derniers passagers, je suis la seule à ne pas avoir de voisin."
Que s'est il passé durant les grandes vacances d'été pour qu'un lycée presque dans son entièreté décide de la ridiculiser, la brutaliser ou la rejeter ? Nous le devinons rapidement, même si rien ne nous est franchement dit dans un premier temps (la narratrice prenant soin de semer progressivement des indices tout autant implacables que violents). Peu importe, ce qui compte ce n'est finalement pas uniquement l'évènement traumatisant subi par notre jeune héroïne que la façon dont ce traumatisme s'exprime sans parole mais pas sans langage corporel ni blessures (physiques et morales) et comment il oblige Melinda à observer plus précisément voire plus cruellement le monde qui l'entoure, les dysfonctionnements du système éducatif et ceux de la cellule familiale.
Dès les premières lignes, Vous parler de ça s'impose à nous comme un long monologue qui révèle tout aussi bien le chaos dans l'esprit de Melinda, la cruauté et l'égoïsme des personnes qui occupent son entourage affectif et géographique mais aussi la culpabilité, la terreur et le sentiment de révolte qui à tour de rôle l'étouffent. Bien que muette, la jeune fille n'est silencieuse qu'en tant que personnage mais non comme narratrice. Ainsi à aucun moment nous échappons à sa vision et encore moins à sa pensée.
Toutefois si Melinda est omniprésente, il y a de nombreux personnages secondaires. Ainsi, au cours de la lecture, nous croisons des élèves plus ou moins futiles, méchants, indifférents, bien ou mal dans leur peau; des professeurs plus ou moins bienveillants ou encore des parents qui, eux, apparaissent systématiquement dépassés et peu perspicaces. Parmi ces personnages, certains d'entre eux vont au fil des pages évoluer positivement et ce uniquement grâce à Melinda. Et c'est un des paradoxes et tours de force de ce récit que de faire d'une jeune fille mutique, esseulée, meurtrie et mal aimée le personnage qui a finalement le plus d'influence sur ses "camarades". Au-delà de sa fragilité, Melinda se révèle avoir une vraie force de caractère. Mais pour que sa véritable nature s'impose à ses propres yeux et au regard de tous et pour pouvoir enfin passer à autre chose, il lui a fallu vivre une année de malheurs, de solitude et de remises en cause. Il lui a aussi fallu verbaliser le drame qu'elle a vécu et accepter de l'aide notamment celle de son professeur d'arts plastiques. La jeune fille recluse va "renaître" sous nos yeux, puisant sa force dans sa propre rage.
Laurie Halse Anderson a su trouver les mots justes et la construction narrative idéale pour parler d'un drame mais aussi de la difficulté d'être adolescent tout en évitant le larmoyant ou les stéréotypes.
Ponctué par de courts chapitres, Vous parler de ça est un roman d'apprentissage bouleversant et captivant sur l'adolescence et le passage délicat entre l'enfance et l'âge adulte, sur l'incapacité de communiquer ou encore sur la violence qui régit parfois les comportements entre adolescents. L'auteur a réussi à faire de Melinda un personnage foncièrement fort loin de l'image qu'elle laisse paraître de prime abord. C'est la raison pour laquelle elle suscite page après page toujours plus d'empathie. Et s'il y a de la rage, de la méfiance, de la détresse et de la gravité chez ce personnage il y a aussi beaucoup d'humour et de sensibilité.
Ce roman -j'en suis persuadée- ne vous laissera pas indifférents.
Et plus si affinités :
Découvrir La belle Colère, ce jeune "label" fondé et dirigée par Stephen Carrière -directeur éditorial des Editions Anne Carrière- et Dominique Bordes -fondateur des Editions Monsieur Toussaint Louverture- et dont la politique éditoriale est de mettre l'adolescence au coeur d'un récit qui s'adresse tout autant à un lectorat adulte qu'adolescent. J'avais déjà lu et aimé Dieu me déteste de Hollis Seamon.
L'auteur :
Née en 1960, Laurie Halse Anderson est une romancière américaine essentiellement (re)connue pour ses romans jeunesse.
Vous Parler de ça ( Speak, 1999) fut très bien accueilli lors de sa parution tant par la critique que par le public. Il a fait l'objet d'une adaptation cinématographique en 2004.
Ce roman -j'en suis persuadée- ne vous laissera pas indifférents.
Et plus si affinités :
Découvrir La belle Colère, ce jeune "label" fondé et dirigée par Stephen Carrière -directeur éditorial des Editions Anne Carrière- et Dominique Bordes -fondateur des Editions Monsieur Toussaint Louverture- et dont la politique éditoriale est de mettre l'adolescence au coeur d'un récit qui s'adresse tout autant à un lectorat adulte qu'adolescent. J'avais déjà lu et aimé Dieu me déteste de Hollis Seamon.
L'auteur :
Née en 1960, Laurie Halse Anderson est une romancière américaine essentiellement (re)connue pour ses romans jeunesse.
Vous Parler de ça ( Speak, 1999) fut très bien accueilli lors de sa parution tant par la critique que par le public. Il a fait l'objet d'une adaptation cinématographique en 2004.
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