La Une du Charlie Hebdo n°1058 signée Charb |
Charlie Hebdo et moi :
Je n'avais pas le coeur de publier depuis les événements tragiques de la semaine dernière alors même que la chronique de mon 3ème invité et que mon dernier coup de coeur étaient programmés depuis plusieurs jours. Si j'édite maintenant c'est après avoir accepté l'invitation faite par certains blogueurs de rendre un modeste (et maladroit) hommage aux victimes de Charlie Hebdo. Normalement cet article aurait dû paraître le mercredi 14 soit une semaine après la tragédie, sauf que je n'étais alors pas prête à rendre une quelconque copie. Finalement, voici cette chronique une semaine après la marche républicaine qui a uni au moins 4 millions de personnes. Au cours de cet article, je ne vous parlerai pas de ce sentiment d'avoir perdu des personnes qui à certains égards me semblaient proches, de cette impression de vivre dans une société dans laquelle je me retrouve de moins en moins, de ce malaise qui me tenaille, ni de cette boule au ventre qui ne me lache pas depuis le 7 janvier mais uniquement mon rapport à ce "journal irresponsable".
Je n'avais pas le coeur de publier depuis les événements tragiques de la semaine dernière alors même que la chronique de mon 3ème invité et que mon dernier coup de coeur étaient programmés depuis plusieurs jours. Si j'édite maintenant c'est après avoir accepté l'invitation faite par certains blogueurs de rendre un modeste (et maladroit) hommage aux victimes de Charlie Hebdo. Normalement cet article aurait dû paraître le mercredi 14 soit une semaine après la tragédie, sauf que je n'étais alors pas prête à rendre une quelconque copie. Finalement, voici cette chronique une semaine après la marche républicaine qui a uni au moins 4 millions de personnes. Au cours de cet article, je ne vous parlerai pas de ce sentiment d'avoir perdu des personnes qui à certains égards me semblaient proches, de cette impression de vivre dans une société dans laquelle je me retrouve de moins en moins, de ce malaise qui me tenaille, ni de cette boule au ventre qui ne me lache pas depuis le 7 janvier mais uniquement mon rapport à ce "journal irresponsable".
Non, je ne suis pas abonnée à Charlie hebdo (je ne m'abonne à rien même pas aux quotidiens que je pourrais acheter tous les jours...) mais ce journal je le lis régulièrement -et jamais avec regret- attirée par une Une, un trait d'humour et d'esprit, un jeu de mots ou simplement pour avoir le plaisir de renouer contact avec des rubriques et des personnages momentanément laissés en retrait.
Je ne suis pas non plus une grande lectrice de BD (je dois même avouer que je suis assez nulle dans ce domaine) et pourtant j'ai aimé lire et recevoir -grâce à des parents et des proches grands lecteurs de bandes dessinées et de journaux satiriques- les recueils de Reiser, Cabu, Tardi ou encore les Mafalda et Peanuts que j'ai eu entre les mains. En fait j'ai l'impression d'avoir été assez tôt sensibilisée à l'art du dessin de presse, de la caricature mais aussi à l'humour qu'il soit tendre, potache, noir, pince-sans-rire... Et Charlie Hebdo c'est de l'humour informatif à chaque page.
D'ailleurs n'est-ce pas le propre de ce dernier que d'être irrévérencieux, tout à la fois impertinent (dans la forme et le ton) et pertinent (dans le fond), de nous bousculer dans nos certitudes, de nous avertir sur les dérives de notre société ou bien encore de poser un regard différent sur le monde dans lequel nous évoluons? Charlie Hebdo c'est pour moi une aventure humaine et intellectuelle menée par des journalistes professionnels, des citoyens lucides et courageux, des pacifistes forcenés, des défenseurs acharnés des libertés (dont la liberté d'expression) et de la laïcité. Je ne suis pas forcément en accord avec l'ensemble de leurs publications -ça peut parfois picoter ou démanger- mais j'admire leur opiniâtreté et leur talent. Car il faut un immense talent pour réussir en quelques traits et répliques bien senties à rendre la complexité et les travers de notre société et à pointer nos défauts les plus insupportables. C'est justement cette façon de faire du journalisme, cette "façon fraternelle de s'adresser aux gens" [comme l'a justement dit Philippe Val à France inter], de faire débat en faisant rire avec des sujets sérieux qui vient d'être exécutée.
Les premières figures auxquelles je pense en écrivant ce texte c'est celle de Cabu (Ah Récré A2 avec les apparitions du Grand Duduche et Mon Beauf chanté par Renaud) et de Wolinski dont les dessins, les rires et -pour ce dernier- les coups de gueule ont accompagné de nombreuses générations. Puis surgit celle de Charb avec ses personnages si reconnaissables -avec leur tronche de travers, leur teint jaunâtre, leurs yeux globuleux. Charb et ses répliques implacables, ses dictons du jour sans cesse inspirés et ses deux animaux de compagnie (peu fréquentables mais franchement drôles) Maurice et Patapon "moins bêtes que méchants" mais désormais orphelins.
Histoire de remettre, le temps d'une chronique, un peu de légèreté et de gentille méchanceté dans cet univers de brutes haineuses, je vais consacrer les quelques lignes suivantes à ces deux larrons qui m'amusent tant.
Histoire de remettre, le temps d'une chronique, un peu de légèreté et de gentille méchanceté dans cet univers de brutes haineuses, je vais consacrer les quelques lignes suivantes à ces deux larrons qui m'amusent tant.
Maurice et Patapon :
Créée en 1999, cette série de BD - composée de six tomes (dont quatre publiés par les éds Hoëbeke et deux par les éds Les Echappés)- est fidèle à l'esprit de Charb : anti-FN, laïque, contre la société de consommation, le politiquement correct et l'obscurantisme.
Portée par un chien prénommé Maurice et un chat portant le nom de Patapon, cette bande dessinée (une juxtaposition de saynètes en fait) fait mouche à chaque page. La présence de ces deux compères (cons pères râleurs, bavards, observateurs féroces et vifs d'esprit qui ne perdent aucune occasion de disserter sur le monde) permettait à son auteur d'aborder une grande variété de sujets tantôt anodins tantôt de société et ce en utilisant les différents registres de l'humour potache (du scatologique au pornographique en passant par toute les formes d'irrévérence et de désacralisation). Chacune de ces vignettes révèlent alors un sens du rythme, de la concision et de la formule magistralement maîtrisé. Attention à ne pas mettre entre toutes les mains ou devant des yeux innocents !
On peut toujours taxer cet humour de facile et/ou de grossier mais quelle efficacité et quelle audace !
Charb concevait les histoires de Maurice et Patapon (un mix entre Maurice Papon et "Et ron et ron, petit patapon" ?) comme des instantanés et les dessinait avec la même économie de moyens (rarement plus trois vignettes juxtaposées, pas plus de trois couleurs différentes, un arrière plan monochrome, pas de fioritures, une seule action par vignette) et le même sens de la répartie que ceux utilisés pour concevoir ses dessins satiriques (trois paroles et le tour est joué !). Le caractère cinglant des saynètes suscitait ainsi une réaction franche chez les lecteurs que ce soit le rire, la surprise, le sentiment d'exagération... Charb ne faisait pas dans la dentelle.
Maurice -le chien orange (du moins pour les versions les plus récentes), obsédé par le sexe et la merde, extraverti, crade et anarchiste- occupe essentiellement le devant de la scène tandis que Patapon -le chat jaune tigré, asexuel, hygiéniste, cruel, placide voire passif- regarde plus souvent qu'il n'agit sauf lorsqu'il s'agit d'écraser des coccinelles et des fourmis (comme on peut écraser un mouvement de grève dans certains pays) ou de lacérer des objets, des personnes ou des oisillons. Les deux se complètent et finalement s'accordent plutôt bien. Ils ont beau avoir l'apparence d'animaux de compagnie, ils réagissent comme des êtres humains avec leurs blagues et philosophie de comptoir ou leur regard sur la société tantôt amusé tantôt désabusé mais toujours déconcertant car sans aucune retenue. Tout le monde en prend plein la gueule quelque soit sa position sociale, politique et religieuse. Parce qu'il en avait marre que les animaux servent "de support à l’expression de nos sentiments les plus mièvres et les plus cul-cul…", Charb avait fait d'eux des personnes à part entière, capables de s'insurger ouvertement et d'exprimer des sentiments et des avis tranchés. J'ai été touchée lorsque j'ai vu revivre ces deux affreux personnages dans le dernier Charlie Hebdo grâce au coup de crayon de Luz.
Les albums Maurice et Patapon par Charb (dessins et textes) :
*aux éds Hoëbeke :
La France qui se lèche tôt, 2007
Hausse du pouvoir d’un chat . 2009
*Les premières versions de cette BD sont parues aux éds Charlie Hebdo en tant que hors-séries (1999, 2000 et 2005)
Et plus :
Être dessinateur de presse à Charlie Hebdo :
Les albums Maurice et Patapon par Charb (dessins et textes) :
*aux éds Hoëbeke :
Coupables, forcément coupables, 2005 (il s'agit en fait de la réédition en couleur du hors-série n°1)
Ça rafraîchit, 2006 ( réédition en couleur du hors-série n°2)La France qui se lèche tôt, 2007
Hausse du pouvoir d’un chat . 2009
*Aux éds Les Echappés:
Ni dieu ni maître!, 2012
Mariage pour tous, 2013*Les premières versions de cette BD sont parues aux éds Charlie Hebdo en tant que hors-séries (1999, 2000 et 2005)
Et plus :
Être dessinateur de presse à Charlie Hebdo :
(vidéo mise en ligne par PublicSenat)
Chez les autres blogueurs (liste non exhaustive):
Sur Cabu :
Les impubliables, de Cabu et Wozniak chez Vdujardin
Dessins cruels, chez blog o noisettes
New-York, chez Marion
L’intégrale beauf, chez une case en plus
Le Grand Duduche, chez Karine
Carnets d’un fou de jazz, chez Solenn
Sur Charb :
La vie de Mahomet, chez Yaneck
Maurice et Patapon, chez O comme Colomb
Maurice et Patapon, chez Fan de BD
Sur Tignous :
Pandas dans la brume, chez Melo
Les thématiques :
"Dessinateurs de presse", chez Caro
"Quand le 9e art rend hommage à Charlie", chez Noukette
"Hommage", chez Violette
Enfin même si le but de cette page est de rendre hommage à Charlie Hebdo, dans un tel contexte il m'est difficile de ne pas avoir une pensée pour les personnes décédés durant ces trois jours d'effroi : Cabu, Wolinski, Charb, Bernard Maris, Elsa Cayat, Tignous, Honoré, Moustapha Ourrad, Michel Renaud, Franck Brinsolaro, Frédéric Boisseau, Ahmed Merabet, Clarissa Jean-Philippe, Philippe Braham, Yohan Cohen, Yoav Hattab, François-Michel Saada.
Sur Cabu :
Les impubliables, de Cabu et Wozniak chez Vdujardin
Dessins cruels, chez blog o noisettes
New-York, chez Marion
L’intégrale beauf, chez une case en plus
Le Grand Duduche, chez Karine
Carnets d’un fou de jazz, chez Solenn
Sur Charb :
La vie de Mahomet, chez Yaneck
Maurice et Patapon, chez O comme Colomb
Maurice et Patapon, chez Fan de BD
Sur Tignous :
Pandas dans la brume, chez Melo
Les thématiques :
"Dessinateurs de presse", chez Caro
"Quand le 9e art rend hommage à Charlie", chez Noukette
"Hommage", chez Violette
Enfin même si le but de cette page est de rendre hommage à Charlie Hebdo, dans un tel contexte il m'est difficile de ne pas avoir une pensée pour les personnes décédés durant ces trois jours d'effroi : Cabu, Wolinski, Charb, Bernard Maris, Elsa Cayat, Tignous, Honoré, Moustapha Ourrad, Michel Renaud, Franck Brinsolaro, Frédéric Boisseau, Ahmed Merabet, Clarissa Jean-Philippe, Philippe Braham, Yohan Cohen, Yoav Hattab, François-Michel Saada.
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