Héloïse Guay de Bellissen, Les enfants de choeur de l'Amérique, éds Anne Carrière
Mon coup de coeur:En 1980, en l'espace de quatre mois, Mark David Chapman et John Hinckley marquent l'histoire et plus particulièrement celle des Etats-Unis. Ils ne se connaissent pas, ne se sont jamais rencontrés et a-priori rien ne permet de les lier si ce n'est l'acte de violence par lequel ils se sont rendus célèbres et leur amour inconditionnel pour un personnage mythique de la littérature: Holden Caulfied, protagoniste du célébrissime L'attrape coeur de J.D. Salinger.
Les Enfants de choeur de l'Amérique c'est le parcours singulier, déjanté et criminel de deux garçons issus de famille monoparentale de la middle-class américaine qui ont grandi dans une relative précarité matérielle, affective et sociale. Ces deux "enfants" se nomment donc Mark David Chapman et John Hinckley. Le premier a assassiné John Lennon alors qu'il admirait le chanteur, le second a tiré sur me président Ronald Reagan afin d'attirer l'attention de la toute jeune Jodie Foster (la belle et paumée Iris dans Taxi Driver). A travers le récit parallèle de leurs deux parcours se dégagent une même solitude, une hyper-sensibilité et un rapport au monde fondamentalement faussé. Afin de souligner leur mal être et leur déchéance, le narrateur prend ici le parti d'alterner leur histoire respective avec celle de deux autres personnages; à savoir Holden Caulfied et l'Amérique elle-même personnifiée par un choeur qui ose clairement faire son autocritique et dire ses blessures, son désarroi mais aussi son indignation vis-à-vis des monstruosités qu'il a laissé faire. Et par-delà les voix des quatre protagonistes surgissent alors celles des victimes. Certaines sont restées célèbres -Marilyne Monroe, Elvis Presley ou les frères Kennedy- tandis que d'autres sont tombées dans l'oubli comme d'Emmett Till, jeune garçon afro- américain battu à mort pour avoir "importuné" une femme blanche et qui plus est mariée. Qu'importe ici toutes ces présences ont la même importance, disent la même vérité, la même tragédie et plongent le lecteur au coeur même de cette société malade, individualiste et sans compassion.
"Enjoy, ne rien posséder et croire que tout est possible, voilà le secret. Parfois, certains de mes mômes ne suivent pas les règles du jeu. Ils pillent, ils tuent ils cognent fort. Je ne suis pas complètement innocente dans cette affaire, la rage ça se transmet. Comme toute bonne mère qui se respecte, j'ai des failles. Je suis la terre qui a vomi ses propres ancêtres...
Je suis la mémoire d'un secret inavouable. Le rêve américain n'existe pas, mais chut ! Il faut y croire pour faire du grand cinéma."
L'auteur :
Née en 1981, Héloïse Guay de Bellissen est l'auteur du Roman de Boddah (éds Fayard) et de livres aussi bien consacrés au slam qu’à Spinoza. Elle a été libraire puis chroniqueuse pour le site www.bakchich.info (en 2009), et compte parmi ses romanciers fétiches Edgar Poe, Lovecraft, Maupassant ou encore Stephen King.
"Enjoy, ne rien posséder et croire que tout est possible, voilà le secret. Parfois, certains de mes mômes ne suivent pas les règles du jeu. Ils pillent, ils tuent ils cognent fort. Je ne suis pas complètement innocente dans cette affaire, la rage ça se transmet. Comme toute bonne mère qui se respecte, j'ai des failles. Je suis la terre qui a vomi ses propres ancêtres...
Je suis la mémoire d'un secret inavouable. Le rêve américain n'existe pas, mais chut ! Il faut y croire pour faire du grand cinéma."
En s'appuyant continuellement sur des faits véridiques, ce roman raconte non seulement le parcours chaotique de deux des plus célèbres criminels américains mais il narre surtout les névroses d'un pays qui -après s'être s'est fourvoyée jusqu'au point de non retour- a lâchement abandonné ses enfants et a fait de certains d'eux des criminels sociopathes en quête de célébrité et de reconnaissance.
Les enfants de coeur de l'Amérique est un roman qui se saisit des dérives de l'Amérique avec audace, humour et perspicacité. Voici une fiction bien documentée et agréable à lire, avec un parti pris narratif intéressant (même si j'aurais aimé que le choeur soit parfois moins bienveillant) et qui évite l'écueil du pur exercice de style et du sensationnel. Vous l'aurez compris ce roman a été pour moi une des belles découvertes de cette rentrée et il me donne envie de suivre l'avenir littéraire de Héloise Guay de Bellissen.
Née en 1981, Héloïse Guay de Bellissen est l'auteur du Roman de Boddah (éds Fayard) et de livres aussi bien consacrés au slam qu’à Spinoza. Elle a été libraire puis chroniqueuse pour le site www.bakchich.info (en 2009), et compte parmi ses romanciers fétiches Edgar Poe, Lovecraft, Maupassant ou encore Stephen King.
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